Speech: Intervention lors du débat sur le Mécanisme de Résolution Unique

Met dank overgenomen van Europese Commissie (EC) i, gepubliceerd op dinsdag 4 februari 2014.

Commission européenne

[Seul le texte prononcé fait foi]

Michel BARNIER

Membre de la Commission européenne, chargé du Marché intérieur et des Services

Intervention lors du débat sur le Mécanisme de Résolution Unique

Réunion plénière du Parlement européen

Strasbourg, le 4 février 2014

Dans ce dossier, la Commission partage largement les aspirations du Parlement depuis le début. Je ne parle pas seulement des six mois écoulés depuis la publication de notre proposition, mais encore bien avant notre proposition, depuis le rapport non-législatif de Mme Ferreira, à laquelle nous adressons nos voeux de prompt rétablissement, en 2010.

Comme vous, nous voulons un système rapide, crédible et démocratique pour la gestion des crises bancaires en Europe.

Votre Parlement a fait savoir, par la voix de son Président et de Mme Bowles, son désaccord avec l’organisation d’une conférence intergouvernementale sur un texte introduit en procédure législative ordinaire.

Sur ce point, comme vous le savez, la position de la Commission est claire depuis le début : l'Article 114 constitue la base juridique appropriée pour la création du Fonds unique. Aujourd’hui et plus que jamais, je maintiens cette position. Pour autant, le choix politique effectué par le Conseil, de laisser les cotisations au fond de résolution prévues par la BRRD au niveau national n'est pas, selon l'analyse de notre service juridique, contraire au Traité.

Il est toutefois essentiel que le contenu de l'accord intergouvernemental soit bien limité aux éléments nécessaires pour gérer le transfert et la mutualisation des contributions bancaires. Tous les autres éléments - y compris la création du Fonds, sa gouvernance, ses missions, le calcul des contributions et l’emprunt entre compartiments nationaux dans la phase transitoire - doivent être fixés par le règlement adopté en procédure législative ordinaire. Accepter pour le Parlement européen et par réalisme, un accord intergouvernemental limité, est une concession. De son côté, le Conseil doit reconnaître pleinement le rôle de ce Parlement en tant que co-législateur. Une fois ce principe posé, l'objectif est maintenant et en quelques semaines, de dégager, sur le fond, les éléments d’un compromis ambitieux et acceptable. A ce stade il y a essentiellement trois grands sujets, qu'il faut régler ensemble:

  • le financement,
  • la gouvernance
  • et la responsabilité démocratique du board.
  • 1. 
    Sur le financement, d’abord, qui est évidemment au cœur des débats, je propose quatre pistes de travail si vous le voulez bien:

Premièrement, plus vite nous mutualiserons les compartiments nationaux, mieux ce sera. Je suis personnellement favorable à une mutualisation en 5 ans plutôt que 10. Alternativement, si nous souhaitons maintenir une unité, un parallélisme entre la période prévue pour abonder le fond et la mutualisation, nous pourrions envisager une période de 7 ans pour attendre la "steady phase". Dans une telle hypothèse, nous pourrions prévoir une mutualisation accrue au début de la période (par exemple au lieu de 15% par an sur 7 ans, on pourrait imaginer 40% la première année, 30% la deuxième, 20% la troisième et 5% la quatrième et cinquième années).

Deuxièmement il faut renforcer le financement croisé entre compartiments nationaux. Si un compartiment national se révèle insuffisant pour la résolution d'un établissement, il doit pouvoir emprunter aux autres compartiments.

Troisièmement, à la fin de la période transitoire, c'est-à-dire lorsque le fonds sera entièrement mutualisé, le Board doit être capable de collecter directement auprès de toutes les banques les contributions nécessaires, y compris les contributions ex post devant être levées en urgence en cas de besoin de financement. Le Conseil présente l’accord intergouvernemental comme un outil nécessaire ? Soit, par réalisme ! mais alors ce doit être une solution temporaire qui laissera place à une solution viable à l’issue de la mutualisation.

Quatrièmement, il faut avancer dès maintenant sur la question des backstops, même si ceux-ci ne sont mis en commun que progressivement. Je pense, par exemple, que nous pourrions explorer l’idée de Mme Ferreira d’une ligne de crédit en dernier ressort. Le risque est d’ailleurs limité, puisque les backstops n’interviendront que sous la forme de garanties et de prêts dont le remboursement sera assuré par de l’argent privé sans incidence pour le contribuable.

Pour finir sur le financement, nous devons nous garder de focaliser la négociation excessivement sur la question du fonds. Il faut mesurer les réformes déjà réalisées avec vous sur la supervision, la capitalisation et même la résolution. Avec l’accord politique sur la Directive BRRD, nous ne sommes déjà plus dans la même époque. Le principe directeur, c’est désormais le bail-in, pas le bail-out. L’utilisation des fonds de résolution doit donc rester exceptionnelle.

Et je rappelle enfin qu’il ne s’agit pas d’argent public mais bien d’argent collecté auprès du secteur privé !

Deux points en complément, si vous le permettez.

  • 2. 
    Au-delà du financement, nous devons trouver un compromis viable et crédible sur la question de la gouvernance.

Lorsque j’ai mis sur la table la proposition SRM, j’ai insisté, sans être idéologue, sur la nécessité d’une prise de décision rapide et efficace.

La stabilité financière et le sort des déposants sont trop importants pour les sacrifier au nom d’une concurrence institutionnelle déplacée. Les décisions de résolution doivent être motivées par l’excellence technique et non pas par des considérations de politique nationale ou d’égo institutionnel. Et c'est dans cet esprit-là que j'avais proposé que la Commission européenne soit l'institution chargée d'appuyer sur le bouton de la résolution. Le Conseil a choisi une autre voie.

Le Parlement et le Conseil ont demandé à la Commission de faire preuve de créativité et de concevoir un système conforme à l’état de la jurisprudence. L’arrêt rendu par la Cour de justice récemment sur la vente à découvert confirme de la validité du système que nous avions initialement proposé. Je m'engage personnellement à tout mettre en œuvre pour trouver des solutions créatives.

  • 3. 
    Troisièmement, les discussions devront permettre de renforcer la responsabilité démocratique du board.

D’emblée, dans notre proposition nous avions affirmé clairement le principe d’une autorité indépendante mais comptable de ses actes devant le Parlement.

Vous avez souhaité renforcer cette légitimité démocratique du board, et je vous soutiens entièrement sur ce point.

Sur le fond, je suis convaincu que le Conseil partage également cet objectif, et j’espère que les discussions permettront de trouver un compromis satisfaisant.

En conclusion, voici donc à mon sens les grands enjeux qui se posent à nous dans les trilogues à venir et quelques une des solutions que je me permets de mettre sur la table comme des propositions constructives.

A la lecture de la réponse de la Présidence Grecque à Mme Bowles, il me semble que le Conseil est prêt à faire preuve d’esprit de compromis. La Commission, de son côté, est là pour faciliter la recherche de solutions et vous pouvez compter sur mon aide et celle de mes équipes et services.

Il nous reste quelques semaines pour trouver un accord. Ce sujet est trop important pour risquer un échec ou une attente trop longue qui fragiliserait l'ensemble de la construction de l'union bancaire. Depuis l’éclatement de la crise financière en 2008, et plus encore depuis le début de la crise de la dette souveraine en 2010, l’Europe a pu mesurer les conséquences de son indécision à chaque fois qu’elle peine à prendre les mesures qui s’imposent rapidement. Nous sommes dans la dernière ligne droite de l’Union bancaire, le projet le plus ambitieux de ces dernières années et notre priorité absolue pour assainir le secteur financier et rétablir la confiance. Il s’agit de ne pas faiblir au moment où nous approchons du résultat.