Toespraak eurocommissaris Barnier (Interne markt) over sociale rechten interne markt (fr)

Met dank overgenomen van Europese Commissie (EC) i, gepubliceerd op dinsdag 28 juni 2011.

Mesdames, Messieurs,

Je sais que cette conférence a été riche en débats et en enseignements.

Sur des sujets aussi complexes que l’articulation des droits sociaux fondamentaux et des libertés économiques, il faut savoir trouver le temps d’échanger, de confronter les faits, les chiffres, mais aussi les analyses et convictions de chacun.

Cet échange est d'autant plus important que droits fondamentaux et libertés économiques illustrent bien la tension qui existe, au cœur même du projet européen, entre des principes qui, pour être conciliés, requièrent que des équilibres délicats soient trouvés.

Par les libertés économiques qu’elle énonce, la construction européenne nous unit toujours plus étroitement, renforçant l’interpénétration de nos économies et créant ces solidarités de fait que les pères fondateurs appelaient de leurs vœux.

Mais par les droits sociaux qu’elle consacre, dans leur diversité, elle s’expose aussi à entraver ce processus, au nom de la protection légitime qu’elle doit à ses travailleurs.

C’est pourquoi la relance du Marché intérieur passe par un réexamen démocratique des équilibres à définir ou redéfinir entre des logiques qui pourraient, à première vue, sembler antagonistes.

C’est cette démarche que j’ai voulu engager, sous l’autorité du Président Barroso et avec plus d’une dizaine de mes collègues, avec l’Acte pour le Marché unique et son approche globale.

Dans son propos introductif hier, László Andor i a fait référence au diagnostic lucide posé par Mario Monti i sur nos difficultés à penser l’articulation de l’économique - dont il faut toujours garder à l’esprit la finalité unificatrice dans l’esprit des pères fondateurs - et du social.

Ces tensions ne datent pas d’hier mais elles ont été ravivées par les arrêts rendus par la Cour entre 2007 et 2008.

On ne peut pas s’en remettre aux juges pour répondre à ces défis, car ils sont de nature fondamentalement politique.

Il incombe donc à la Commission - force de proposition de l’Union ; garante des grands équilibres ; institution elle-même politique - d’esquisser cette réponse, en donnant tout son sens à la notion d’« économie sociale de marché hautement compétitive », qui figure au frontispice des traités.

Dans cette notion, chaque mot compte. Et la dimension sociale du Marché intérieur est, au même titre que la compétitivité, au cœur de l’ambition affichée dans l’Acte pour le Marché Unique.

Ce programme - notre feuille de route pour les 18 mois à venir - déroule une logique simple :

Pour retrouver de la croissance, il nous faut mieux exploiter le gisement que représente le Marché unique des services. Un marché encore trop fragmenté, loin d’avoir atteint son potentiel.

Il faut donc encourager la prestation de services transfrontaliers. En libérant les énergies, en multipliant les opportunités pour les entreprises, nous favoriserons l’innovation et nous créerons des emplois.

C’est ce que nous avons fait avec la Directive services. Et c’est ce que nous continuons à faire avec le nouveau Plan d’action, adopté à mon initiative le 27 janvier dernier, pour approfondir le marché intérieur des services.

Mais pour réussir, il faut donner aux entreprises qui veulent se projeter au-delà de leurs frontières nationales la possibilité de détacher leurs salariés. Pour offrir des services, il faut des personnels mobiles et qualifiés. Un marché intérieur qui entraverait le détachement des travailleurs serait voué à l’échec !

Pour retrouver la confiance, il faut aussi offrir au détachement des travailleurs un cadre juridique et administratif qui garantisse à l’ensemble des travailleurs - ceux du pays « source » mais aussi ceux du pays « hôte » - des conditions satisfaisantes de protection de leurs conditions de travail et de leurs droits sociaux.

Car il n’est pas d’intégration économique saine sans préservation des conditions de la cohésion sociale, comme il n’est pas de compétitivité durable sans objectif de progrès social.

La relance du Marché intérieur ne pouvait donc pas faire l’économie d’un réexamen de l’articulation des droits sociaux et des libertés économiques.

Et c’est pourquoi cet engagement figure, sous la responsabilité de mon Collègue László Andor, au nombre des 12 initiatives-clés de l’Acte pour le Marché unique.

Je ne reviendrai pas en détail sur les deux initiatives législatives annoncées le 13 avril dernier et les questions complexes qu’elles soulèvent. Elles ont été exposées en ouverture de la conférence par László et intensément débattues.

Quatre points, toutefois méritent d’être relevés.

Premièrement, notre engagement à mieux prendre en compte l’impact social de nos initiatives.

J’ai indiqué dès le début de mon mandat qu’il nous fallait progresser encore sur ce terrain.

La Commission s'est engagée à approfondir cet aspect dans toutes les études d’impact qui accompagnent ses propositions législatives dans le domaine du Marché intérieur.

C’est ce que nous mettons en pratique sur les sujets difficiles que vous avez discutés.

Plusieurs études ont été présentées ce matin, sur le détachement dans ses différents aspects. En particulier, une étude commanditée par la Commission sur les aspects économiques et sociaux du détachement, viendra nourrir l'étude d'impact qui accompagnera notre proposition.

Cette conférence illustre aussi notre volonté de concertation autour de toutes les initiatives législatives que prendra la Commission au titre du maintien et de la promotion de la cohésion sociale.

Deuxièmement, notre ambition d’aborder de front l’enjeu d’une articulation mieux assumée entre des normes toutes aussi fondamentales au regard du projet européen : libertés économiques et droits sociaux.

La Commission tire naturellement toutes les conséquences du Traité de Lisbonne et de la Charte des droits fondamentaux dans ses propositions législatives.

Cela implique le plein respect du droit des travailleurs à recourir à des actions collectives pour la défense de leurs intérêts, y compris à la grève. Mais n'oublions pas que ce droit, aussi fondamental qu’il soit, n'est pas pour autant sans limites. Le droit aux actions collectives est d'ailleurs encadré dans tous les Etats membres, sans exception.

Nous nous sommes désormais engagés - le défi n'est pas des moindres - à clarifier autant que possible la manière dont l'exercice de ce droit peut, dans un contexte transfrontalier, être concilié avec les libertés économiques du Traité, qui confèrent aussi des droits essentiels.

László Andor vous a présenté l'état de ses réflexions en la matière. Des suggestions ont été faites et débattues durant ces deux jours. Nous les examinerons avec attention.

Je vous réaffirme ici mon engagement personnel à tout mettre en œuvre pour que puissions trouver, ensemble, ce « juste équilibre » qui contribuera à la fondation ou la refondation d’un « pacte social européen ». Et qui redonne de l’élan à un projet dont la réussite est la condition même de notre capacité à relever les défis de l’avenir.

Troisièmement, notre détermination à renforcer l’efficacité, et donc la légitimité, des règles gouvernant le détachement des travailleurs pour un marché intérieur plus compétitif, mais aussi plus juste.

Le bilan de la directive « détachement » fait apparaître des difficultés. Je pense notamment à la coopération administrative - quasi-inexistante ; au manque d'information sur les droits et obligations des travailleurs et des entreprises.

Je pense aussi aux cas d'abus - les sociétés « boites aux lettres » - et de contournement des règles de la part d’entreprises peu scrupuleuses, par exemple avec la pratique des « faux indépendants ».

Vous avez déjà intensément discuté les pistes présentées par László [Andor] dans la perspective de notre future initiative. Nous devrons examiner les suggestions faites, et là encore je m’engagerai pleinement aux côtés de László pour que nous « visions juste », afin de créer autant de consensus que possible sur cette question-clé.

Je l’ai dit tout à l’heure : s’il est essentiel de rassurer en protégeant de toute tentation d’abus ou de contournement, l’équilibre à trouver est très délicat. Le marché intérieur des services n’a en effet de sens que s'il s’appuie sur des mécanismes performants de détachement.

Il faut donc éviter qu’au nom de la lutte contre les pratiques inacceptables de quelques uns, toutes les entreprises vertueuses se trouvent entravées dans leurs activités transfrontalières déjà trop peu développées. Je pense notamment aux PME.

C’est pourquoi je serai particulièrement attentif à ce que la diversité des situations soit prise en compte. Pour que nous ne nous prenions pas le risque de nous priver du potentiel de croissance, et donc d’emplois, du secteur des services en définissant des règles trop générales, qui ne reflèteraient pas la diversité des besoins et pratiques d’un secteur qui représente plus des deux tiers de notre PIB.

En revanche, je crois que l’information mutuelle et la transparence doivent être de mise, s’agissant de pratiques qui doivent certes être promues, mais aussi encadrées et contrôlées.

C’est pourquoi nous devons réfléchir aux mécanismes qui seraient les mieux à mêmes de mettre de la lumière sur tous les comportements « voyous ».

Ce qui me conduit à mon dernier point :

Quatrièmement, notre conviction qu’une grand part de la solution réside dans une meilleure coopération administrative dont notre système « IMI » peut être la pièce maîtresse.

Qui, en effet, mieux que l'administration d'origine d’un prestataire peut vérifier si ce dernier est bien établi là où il le prétend, s'il y paye ses impôts et ses cotisations sociales ? Ou si, au contraire il n’est qu'une simple « boîte aux lettres » ?

Gardon à l’esprit par ailleurs qu’en améliorant la coopération entre administrations, on pourra aussi faire peser moins d’obligations en amont sur les entreprises.

La Commission et les administrations nationales ont déjà commencé à renforcer leur coopération dans le cadre d'un projet-pilote sur l'utilisation de notre fameux « Système d’information sur le Marché intérieur » - IMI pour les initiés - dans le domaine du détachement.

Nous visons à terme le développement d’une application « IMI » spécifique. Les administrations compétentes pourront ainsi facilement communiquer avec leurs homologues dans les autres Etats membres.

Bien sûr ce système n'a pas vocation à remplacer ce qui existe et qui marche bien en matière de coopération bilatérale. Il sera un « plus », qui viendra compléter ce qui existe pour en améliorer l'efficacité.

Mesdames, Messieurs,

Lorsque les initiatives annoncées seront proposées, puis discutées, notre responsabilité à tous sera grande. Car nous aurons là une occasion unique de faire la preuve de ce que l’Europe, par les équilibres qu’elle réussit à redéfinir dans la concertation, débouche sur des solutions « gagnant-gagnant ».

Je compte sur vous tous, sur votre engagement mais aussi votre sens du dialogue et du compromis, pour nous aider à rassurer nos travailleurs et nos concitoyens sur le fait que l’Europe, quelque soit notre identité sociale ou professionnelle, en nous offrant des opportunités comme des sécurités, nous protège bien plus qu’elle ne nous fragilise.