Eurocommissaris Barnier: financiéle stabiliteit voor morgen (fr)

Met dank overgenomen van Europese Commissie (EC) i, gepubliceerd op donderdag 18 maart 2010.

SPEECH/10106

Michel Barnier

Membre de la Commission européenne chargé du Marché intérieur et des services

"Quelle stabilité financière pour demain?"

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Forum Les Echos

Paris, le 18 mars 2010

"Quelle stabilité financière pour demain?"

Je crois que votre conférence pose la bonne question et au bon moment.

En effet, certains, et sans doute certains dans cette salle, considèrent que nous sommes aujourd'hui sortis de la crise. La situation des marchés financiers fait moins la une des journaux. Les réunions d'urgence des grands argentiers sont désormais moins fréquentes. Il y a comme une nouvelle ambiance économique dans le monde. Et les établissements financiers accumulent à nouveau des profits substantiels…!

Pour autant, sommes nous sortis de la crise? Je serais pour ma part très prudent au vu d'épisodes spéculatifs récents sur certains marchés. Les conséquences économiques et sociales de la crise sont, elles, toujours là et pour certaines encore à venir. En France et dans toute l'Europe. Nous sommes loin d'avoir retrouvé les niveaux d'emploi et de croissance qui prévalaient avant la grande secousse de 2008.

Nous ne sortirons pas de cette crise comme nous y sommes entrés.- ni en matière de régulation, ni pour ce qui est de la nature de la croissance qui devra être plus équilibrée, plus juste socialement et plus respectueuse de l'environnement. Ce serait une faute.

Sommes-nous alors sortis de la crise? Vous l'avez compris, je n'en suis pas sûr, même s'il y a des signes positifs. En revanche, ce dont je suis persuadé, c'est que nous sommes au cœur d'une période critique. Celle où les choses se décident, où les décisions prises au plus haut niveau doivent être mises en œuvre, où l'histoire bascule dans un sens ou dans un autre. Celle où nous décidons de tirer ou non les leçons du passé et la stabilité financière que nous voulons construire. C'est un moment de vérité.

Nous voyons, d'ailleurs, se multiplier les appels plus ou moins explicites à l'inaction. Les mises en garde contre le risque de sur-réaction ou de sur-régulation. Parfois de la part de ceux là mêmes qui appelaient, il y a encore quelques mois, une intervention massive des pouvoirs publics.

Ma conviction est différente : il y a urgence à agir et à agir maintenant.

Nous devons agir parce que nous n'avons pas encore tiré toutes les leçons de la crise en termes de régulation et de supervision.

Nous devons agir parce que nos finances publiques ne pourraient pas supporter le coût d'une nouvelle secousse financière comparable à celle que nous avons vécue. La Commission a approuvé des aides publiques au secteur financier représentant 13% du PIB européen.

Nous devons agir parce que c'est notre responsabilité politique. Si les citoyens devaient avoir le sentiment que nous n'avons pas su tirer les leçons de la crise, ils seraient en droit de nous le reprocher fortement. Et rapidement nous verrions dans tous les pays d'Europe, les forces centrifuges qui demeurent à l'affût, l'emporter. Nous verrions ressurgir des comportements de repli identitaire, voire nationalistes. Et c'est toute notre maison commune, cet espace de paix et de prospérité que nous construisons depuis 50 ans, qui serait fragilisé. La première victime serait le marché unique.

Les Européens ont eu le sentiment juste que l'Europe les avait protégés dans la crise. Nous devons à présent leur démontrer que l'Europe agit pour mettre fin à l'absence de transparence et à la mauvaise évaluation des risques et pour prévenir les crises de demain

Je puis vous assurer que la nouvelle Commission est absolument déterminée à retrousser ses manches pour répondre à cette attente légitime. Et construire la stabilité financière de demain. Et nous appelons les gouvernements à prendre leurs responsabilités et à agir de même.

A la place qui est la mienne, comme Commissaire en charge du marché intérieur et des services financiers, j'utiliserai tous les outils à ma disposition pour y contribuer activement. A Bruxelles, mais aussi sur le terrain, auprès des Etats-Membres, des acteurs économiques, et des citoyens européens.

***

I - Pour une régulation financière efficace et intelligente.

Avant de décliner dans le détail les principes fondateurs d'un système financier solide, il me parait indispensable de dire quelques mots de méthode.

Notre effort de réforme doit être global.

Nous ne serons pas sortis d'affaire en changeant quelques paramètres ici et là. Nous ne serons pas sortis d'affaire, non plus, en adoptant une mesure emblématique radicale qu'il s'agisse de l'activité des banques ou du fonctionnement des marchés.

Nous devons bâtir au contraire un ensemble cohérent de réformes qui répondent à chacun des dysfonctionnements ou des fragilités révélés par la crise.

Il faut à la fois plus de prudence dans le système, des contrôles renforcés, des garde-fous supplémentaires mais aussi une culture du risque nouvelle en sein du système financier.

Agir avec détermination mais sans improvisations.

Je ne veux éviter aucune question difficile et je n'hésiterai pas à proposer des règles nouvelles fortes si elles s'avèrent nécessaires. Mais nous agirons sans improvisation.

Je souhaite écouter, m'appuyer sur des études d'impact approfondies et prendre en compte les effets économiques de chaque mesure envisagée et les effets cumulatifs de l'ensemble des réformes proposées.

Par exemple, pour bien calibrer dans le temps et dans leur ampleur les demandes de fonds propres supplémentaires faites aux banques.

Il n'y aura pas de réforme efficace sans l'engagement de tous.

Dans ce domaine, le constat est clair : la course au moins disant est largement responsable de la crise. Je ne crois pas à l'autorégulation. Les chefs d'Etat du G20 se sont engagés sur une feuille de route précise. Nous devons agir ensemble dans un esprit de dialogue et de confiance mutuelle pour tenir ses engagements. Confiance mais pas naïveté.

Je suis convaincu qu'il y a une responsabilité spécifique de l'Union européenne et des Etats-Unis pour tenir les engagements du G20. Nos méthodes peuvent être différentes mais nous devons aller dans la même direction et atteindre les mêmes objectifs.

Il n'y aura pas de réforme si chacun ne prend pas ses responsabilités

La Commission fait et fera son travail mais elle ne peut pas le faire toute seule. Elle propose, ce qui est essentiel mais il revient au Parlement européen et au Conseil de prendre les décisions.

Voila pour la méthode, quelles sont à présent les priorités? Nos priorités pour construire la stabilité financière de demain?

II. La réforme de la supervision doit être la pierre angulaire de notre effort de régulation.

En pleine crise, le Président Barroso a eu la volonté d'ouvrir un chantier fondamental, peut-être le plus structurant, celui de la supervision en confiant un travail d'analyse et de proposition à Jacques de Larosière. Et cela dès le mois de février 2008.

En septembre 2008, la Commission faisait des propositions législatives pour créer des Autorités européennes de supervision et parvenir à trois objectifs principaux:

Créer une surveillance macro économique. Il s'agit de disposer désormais d'une vision globale des risques dans le système financier. Une transaction en elle-même peut être parfaitement prudente, mais si tout le monde procède à la même transaction, cela peut générer des risques importants.

Unifier les pratiques de surveillance et régler les différends entre les autorités nationales. Un marché intérieur compétitif ne peut évidemment pas fonctionner si les règles européennes sont interprétées différemment à Prague ou à Paris.

Enfin, être crédible au niveau international, ce qui n'est évidement pas possible si les autorités de supervision nationales ne se coordonnent pas entre elles et expriment des positions différentes.

C'est un sujet structurant. Nous devons maintenant aller vite et je vais m'efforcer de faciliter un accord entre le Parlement et le Conseil. C'est nécessaire et difficile mais c'est urgent, nous devons mettre en place les Autorités européennes de surveillance début 2011. L'Europe aura alors un système plus robuste et plus moderne, apte à mieux répondre aux défis du futur. Et elle sera la première région du monde à l'avoir fait.

III. Des banques plus solides.

Deuxième chantier clef, renforcer la solidité et la résistance aux crises des banques. C'est un des engagements pris par tous les pays du G20. Nous ne devons plus faire face à des situations de crise marquées par le manque ou la qualité insuffisante de fonds propres de certaines banques.

Les travaux dans ce domaine progressent sous l'impulsion du Comité de Bâle qui fait un bon travail. J'ai moi-même lancé il y a quelques jours une consultation sur la révision de la Directive qui établit ces règles (CRD4).

Je suis convaincu que, les activités risquées doivent devenir plus coûteuses pour les banques. Le sujet est technique et ardu, mais nous devons trouver dans les prochains mois le bon calibrage des nouveaux standards.

Trop exigeants, ils conduiront à un rationnement du crédit et tueront la reprise. Trop laxistes, ils inciteront à un retour des pratiques risquées.

Nous devrons donc trouver le bon équilibre cet automne et réussir notre calibrage à la fois dans l'ampleur du renforcement des fonds propres et dans le temps de leur mise en œuvre.

IV. Des institutions financières responsables.

La réforme de la supervision, le renforcement de la surveillance sont bien sûr indispensables. Mais je crois que le premier niveau de la prévention et de la gestion des risques se situe au sein des entreprises elles-mêmes. Nous devons créér une véritable culture de la prévoyance.

Il nous faut une meilleure gouvernance d'entreprise. Nous avons besoin de dirigeants et d'administrateurs non exécutifs responsables et compétents qui ont l'expertise, les moyens et le temps de remplir leur mission. Cela passe également par une meilleure gestion des risques, et par une implication et une responsabilisation accrues des actionnaires.

Plus de responsabilité, c'est aussi des rémunérations qui n'incitent pas à prendre des risques excessifs. Nous appliquerons strictement les principes du G20: plus de transparence, un meilleur contrôle, des versements différés.

Nous allons aussi proposer d'étendre ces principes rigoureux aux autres acteurs de la finance. De manière à éviter surenchère et distorsions de concurrence.

Au delà, du secteur financier, la Commission va aussi entamer une réflexion sur la rémunération des dirigeants des sociétés cotées. Car en période de difficultés économiques, il faut récompenser la performance à long terme des dirigeants et non les situations d'échec.

V- Des marchés et des produits régulés et transparents

Ce point est particulièrement d'actualité avec les turbulences que nous avons connues sur le marché de certains emprunts d'Etats. Nous étudions les conséquences de la spéculation sur les "Credit Default Swaps" (CDS) souverains et en fonction des résultats, nous examinerons si des mesures sont nécessaires.

Plus généralement, nous devons aller de l'avant sur les produits dérivés en imposant plus de transparence, plus de prudence, plus de contrôle. Nous allons prendre des mesures pour inciter fortement à la standardisation des produits dérivés. Nous allons rendre obligatoire la compensation des produits dérivés standardisés sur des chambres de compensation centrales. Cela devrait réduire significativement les risques consécutifs à la faillite d'un des participants du marché

Nous allons aussi procéder à un enregistrement des transactions dans des organismes centralisés: les "trade repositories", ce qui permettra également d'améliorer l'action des autorités de surveillance. Je ferai des propositions en ce sens au mois de juin.

Enfin, les abus de marché doivent être efficacement poursuivis. Les sanctions doivent donc devenir réellement dissuasives et comparables dans toute l'Europe.

Je pense, qu'avec ces mesures, nous aurons des marchés bien plus sûrs, sans pour autant décourager l'innovation financière.

***

Conclusion: ouvrir le chantier de la prévoyance et de la prévention des crises.

Mon ambition, vous l'avez compris, c'est que l'Europe donne une vraie réponse à cette crise. Qu'elle en sorte plus solide mais aussi plus compétitive.

Je ne crois pas à l'opposition simpliste entre régulation et compétitivité. Tout au contraire, je suis convaincu que le continent qui se dotera le premier d'une régulation intelligente et d'une supervision efficace disposera d'un atout décisif pour attirer demain les investisseurs.

Ceci passe par les réponses immédiates que je viens d'évoquer mais aussi par le chantier difficile mais nécessaire de la prévention et de la gestion des crises. Je réunis demain à Bruxelles le directeur général du FMI et le président de la BCE pour aborder ce sujet. L'objectif est de définir ensemble les composantes d'un cadre européen de gestion des crises. Nous lançons là un chantier essentiel qui exigera de dépasser bien des réflexes nationaux. C'est la pierre de touche qui assurera, je l'espère, à l'avenir la solidité de l'Europe face aux crises de demain.